Noël : Petit audit de famille et ruissellement
Et vous, à Noël, comment vous comportez-vous ?
Noël : Petit audit de famille et ruissellement

Et vous, à Noël, comment vous comportez-vous ?

12 Déc. 2018

La célébration de Noël a conquis tous les milieux sociaux tant croyants que non croyants. C’est un véritable phénomène social ruisselant, l’un des rares à avoir atteint un tel niveau d’universalité. En France …

En France, dans les familles chrétiennes :

Noël, c’est avant tout une histoire de famille. Mais plus finement, Noël c’est le miroir de l’état des relations de notre famille. Et si vous ne connaissez pas l’état de ces relations, effectuez votre propre audit : scrutez ce qui se passe chez vous à Noël !

 

M. Perrot l’a surnommé « l’emblème du home sweet home ».

 

A Noël, c’est la tradition, la famille se retrouve !  Avec la baisse des pratiques religieuses Noël est devenu une fête familiale par excellence et la plupart du temps laïque. On s’offre des cadeaux, et autour d’un repas exceptionnel, gargantuesque ou savoureux on se réunit. Chaleur, et succulentes odeurs se dégagent.  Chacun honore un indicible devoir de présence. Et parés de leur 31, tous ont fait leur possible pour être disponible.

 

Il serait malvenu de se pointer fringué comme un clochard, l’humeur à la bagarre. Car attention ! C’est l’ambiance de team qui prévaut, l’esprit de famille.

Noël c’est un jour fraternel où les gens aiment se remplir d’amour.  C’est une belle soirée passée ensemble, un beau souvenir en puissance.

 

Mais, comme une partition musicale, les festivités restent réglées et jonchées de bémols.  L’implicite règne et exige de chacun de « se tenir », avec le sourire, et de gommer tous les conflits et tensions éventuels. Pas question d’allumer de poudrière.  On n’expose pas ses rancœurs, on ne cherche aucun pou dans les têtes, on n’expose pas ses convictions politiques minoritaires ou inflammables. Les non-dits fusent, mais chaque coeur est disposé à distribuer son meilleur.  Et selon l’osmose, comme dirait un ami grec : can be fun, can be shit !

 

Il s’agit bien d’un rituel familial, mais en réalité on ne voit pas toute la « famiglia » . On se découpe entre « clans qui s’entendent bien », d’autant que les recompositions compliquent la donne. Parfois on se dispute pour savoir où se rendre : chez les tiens, chez les miens ? On doit se partager et se diviser, mais d’une manière générale on s’arrange pour ne laisser personne en plan, tout seul. 

 

En France, chez les non chrétiens :

Noël est devenu ces soixante dernières années un véritable phénomène culturel et commercial.  Ses pratiques dépassent la chrétienté, et se diffusent en dehors du cercle familial.

Effectivement dans nos contrées, la société christianisée se transmet au travers de l’école, la publicité, les décorations publiques et privées flamboyantes, le commerce, les informations. Telle une étoile, dans son sillon la fête entraîne cadeaux, chocolats, foies gras, dindes, bûches, sapins, boules, lumières. Noël brille et brûle de tous feux !

 

C’est ainsi que dans les cours de récré, et dès la crèche, les enfants décorent des sapins, fabriquent des cadeaux, fredonnent des chansons, et finissent par comparer leur « moi j’ai eu ».  Difficile d’échapper à l’événement, et difficile de résister à ses attraits (et obligations). Même s’ils restent empreints de sentiments ambivalents. Et c’est ainsi que dans des appartements juifs, dans des maisons musulmanes, bouddhistes, hindouistes…, non rarement le 24 ou le 25 on marque le coup. Et sous la pression des enfants on retrouve des guirlandes accrochées aux ficus, ou enrobant l’écran, des bûches, glacées ou des présents empaquetés. Un brin de Noël se dépose. Même dans des pavillons athées Noël ruisselle de la cheminée. 

 

Mais n’oublions pas ceux qui ne fêteront pas Noël, parce qu’ils ne le veulent pas.

Soit parce qu’ils sont en froid avec leur famille, tellement glacial qu’ils n’ont plus aucune envie de briser la glace, et qu’ils préfèrent « rester au chaud ». Soit parce qu’ils considèrent la fête trop commerciale, et hypocrite pour être suivie. Soit parce qu’ils considèrent qu’il s’agit d’une histoire de chrétiens, qu’ils n’en sont pas, et à chacun son chemin de croix ! Soit parce qu’ils sont franchement athées et qu’ils ne veulent surtout ne pas en entendre parler !

Et ce soir-là, bien souvent, ils se retrouvent dans certains lieux qui les accueillent : cinémas, bowling, bars,… Parfois même ils se réunissent sans sapin, ni dinde, ni cadeaux, entre eux, pour faire la  fête… 

 

Katia

 

SOURCES

Enjeux familiaux autour de la fête de Noël. Evelyne Favart, ERES, « Dialogue », 2005/2 n°168, pages 107-13

Pinçon-Charlot Monique. Perrot Martyne, Ethnologie de Noël. Une fête paradoxale.. In: Revue française de sociologie, 2001, 42-4. pp. 781-782.

Martyne Perrot, Le cadeau de Noël. Histoire d'une invention, Paris, Éditions Autrement, coll. « Leçons de choses », 2013,

 

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