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Grèves, révoltes et baston : les grands classiques universitaires
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Grèves, révoltes et baston : les grands classiques universitaires

24 Juin 2018

C’est d’un besoin d’indépendance envers les pouvoirs laïcs et ecclésiastiques, que l’université émerge au 13e siècle. Jusqu’alors on apprenait dans les écoles épiscopales ou monastiques.

Plus concrètement, c’est à force de grèves, de révoltes, ou d’affrontements que les élèves et les maîtres arrachèrent leurs droits. En cette période médiévale, où il en va de chaque corps d’essayer d’obtenir des privilèges de la part des pouvoirs.

 

Dans les années 1260, les écoliers parisiens défilent régulièrement dans les rues, avec armes et drapeaux, scandant à pleins poumons des chansons anticléricales.
  • 1215 : Premiers statuts de l’université fixés par Robert de Courson.
  • 1220 : Philipe-Auguste accorde aux écoliers Parisiens de dépendre de la justice ecclésiastique, vachement plus cool (avec eux) que la justice laïque.

  • 1229 : Exil volontaire et protestataire des maîtres et élèves de Paris en 1229. Grégoire IX prend l’université sous sa protection en 1231, elle obtient sa totale autonomie.

Les écoliers se retrouvent farcis de privilèges, faisant d’eux, de leurs maîtres, et de leurs serviteurs, une espèce de « caste » à part, d’autant que tous délits à leur encontre étaient sévèrement punis.

 

…Visitons d’un peu plus près les mentalités de ces ancêtres, et au travers desquelles nous reconnaîtrons notre société actuelle…

  • Fin 12e : on considérait que la transmission du savoir, don de dieu, devait être gratuite. Pour payer les profs, la papauté les pourvoit de bénéfices (en général une terre et ses revenus).

Innocent III leur permet même le cumul des bénéfices, déjà d’actu !, et en réalité nous savons que les « cadeaux » des élèves n’étaient pas rares ! .

 

Un autre principe : les maîtres et les élèves se gouvernaient eux-mêmes.

 

Bien avant Erasmus, les étudiants européens changeaient de ville d’études tous les deux ou trois ans. Naples, Cologne, Oxford.. Leur réflexe était de se regrouper, non pas en fonction des matières étudiées, mais de leur origine géographique. Ainsi, se forment les Nations, sortes de sociétés de secours mutuels. (Nation Normande, Picarde, Lombarde..)

 

Les quartiers étudiants étaient donc multiculturels comme aujourd’hui, et leur langue commune était le latin et non l’anglais (d’où le quartier Latin).

 

Forts de leur protection papale et de leurs privilèges, leur jeu favori était de basher les bourgeois et la police. Les batailles entre Nations se faisaient aussi fréquentes, parfois les maîtres se faisaient insulter, et malmener. Prêts à en découdre, les étudiants semaient la zizanie, et pouvaient mener le pouvoir par le bout du nez.

  • 1304 : le prévôt de Paris fait pendre un étudiant et le laisse accroché au gibet, à l’encontre de tous les privilèges… L’université arrête immédiatement ses cours, et oblige le roi à punir le coupable….. qui devra demander pardon en public, fonder deux chapelles expiatoires, dépendre le mort et le baiser (bisous bisous, et non fuck fuck bang bang ).

Paris (qui se dispute le titre de première univ européenne avec Bologne) jouit d’un tel prestige que ni les papes ni les rois ne se risquèrent à l’attaquer directement.

 

Car, en dépit de toute cette agitation, la papauté et les rois encourageaient l’université.

  • En 1217, Honorius III écrit sur la nécessité de créer une université à Toulouse « afin de lutter contre les cathares par le feu et l’épée, mais aussi par la prédication ».

Quant à la royauté, elle avait besoin d’administrateurs, de conseillers et de juges instruits.

 

Ces dernières semaines ont connu, également, quelques bastons dans les universités.

Qui s’affronte aujourd’hui ?

Trois acteurs principaux.

  • 1- Des étudiants et quelques enseignants contestant la loi ORE, sur un fonds de réprobation générale de la politique du gouvernement, et qui, en signe de désaccord, utilisent les moyens « classiques » : manifestations, blocages et fermetures d’universités.
  • 2- Les forces de l’ordre représentant l’Etat, et qui cherchent à les débucher.

  • 3- Un mouvement d’étudiants ou de citoyens qui n’acceptent pas que les premiers bloquent les universités et l’accès aux cours.

Prenons l’exemple de Strasbourg : le 22 mars 2018, dans cette ambiance de contestation universitaire nationale, des étudiants occupent le Palais universitaire, reliant symboliquement leur mouvement à Mai 68. Ils s’en font déloger par les forces de l’ordre sur demande du président de l’Université.

 

Le 28 mars, cinq étudiants et un lycéen se font agresser alors qu’ils venaient d’arracher des affiches de l’association Bastion social. Pour ceux qui ne connaissent pas, il s’agit d’un groupe installé à Strasbourg depuis décembre dernier, né à Lyon au printemps 2017, de l’initiative d’un militant du GUD, et dont le slogan est « les nôtres avant les autres » . Prêts à en découdre, ils s’opposent aux grévistes, aux gauchistes.

 

C’est ainsi qu’on retrouve des affrontements violents à Montpellier, Lille, un lycée autogéré de Paris… .

 

Hum ! J’ai comme l’intuition que les bastons à l’univ c’est pas terminé !

 

Katia

 

Sources :

 

-La vie des étudiants au Moyen-Age, Léo Moulin, Albin Michel, 1991.

Encyclopédie Universalis.

-https://theconversation.com/comment-lextreme-droite-radicale-se-recompose-en-france-94072.

-Dictionnaire de la France médiévale, Jean Favier

Jacques Verger, « « Ribaudaille » ou « Fille du roy » : l’Université de -Paris entre honneur et violence à la fin du Moyen Âge », Histoire de l’éducation | 2008, http://histoire-education.revues.org/544

 

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