Il s’est imaginé à la fin des années 1970 l’idée que nous pourrions travailler deux heures par jour, seulement. En rupture complète avec les positions générales, elle ne s’est pas concrétisée. Pourtant quarante ans plus tard, cette thèse fait l’objet d’une révision : et si nous ne travaillions qu’une heure par jour ?
Comment y parvenir, vous demandez-vous. C’est ce que cet article vous propose d’exposer.
Mais auparavant, fixons le contexte.
En 1977, lorsqu’elle fut transcrite, cette théorie ne surgissait pas du néant. Les auteurs qui baignaient encore dans les remises en question de « 68 », s’étaient inspirés, notamment, de l’écrit culte de Lafargue « Le droit à la paresse ». Paru fin 19ème, ce dernier fustigeait l’amour des classes ouvrières pour le travail.
Aussi, la démission du mathématicien Grothendieck participa à leur envie d’imaginer une autre société. Le génie, considéré comme l’un des plus grands mathématiciens du 20ème avait choisi d’abandonner son poste à l’IHES, et de plonger dans l’écologisme radical. Il déclara :
« Quel était le sens de mon activité scientifique qui m’entraînait à poursuivre obstinément l’exploration de mondes toujours plus lointains, quand les « vrais » problèmes, ceux qui pose l’évolution de l’humanité, demeuraient, malgré leur urgence, hors des murs de l’institution scientifique ? »
Cette prise de position ébranla le physicien Loup Verlet. A son tour, il délaissa son confortable poste de chercheur. Car, soudainement, pour lui aussi, l’urgence et l’utilité se trouvaient en dehors de son travail.
Un jour, lors d’une réunion entre amis, l’un d’eux proposa l’idée de construire « un modèle économique qui permettrait d’évaluer la quantité de travail nécessaire au fonctionnement de la société ».
Voyons comment ce collectif établit que nous pourrions, tous, ne travailler que deux heures par jour :
En premier, précisons que ces deux heures pourraient s’exercer en une fois dix heures, ou deux fois cinq heures…
L’idée tient en deux grands axes : dégager des heures de travail rémunéré, et transformer la nature du travail.
Ils estiment que beaucoup d’heures travaillées pourraient tout simplement disparaître. Comment ?
Partant du constat que pour un travail hebdomadaire d’une soixantaine d’heures en 1896, six heures suffisaient en 1976, mais que la durée du travail n’avait diminué que de 30%. Ils en déduisirent qu’il était temps d’inverser la vapeur des progrès techniques.
Pour être plus concrets, ils illustrent leurs propos avec la voiture. Ils avancent que si les constructeurs ne fournissaient que deux modèles simples, et durables, alors il y aurait (entre autres) diminution de réparations. Cela éviterait beaucoup de dépenses aux acheteurs, et aux producteurs, qui auraient moins de frais généraux, notamment les frais de gestion des pièces détachées. Ils imaginent une voiture dont la vitesse culminerait à 75/80 km heure, afin de réduire la consommation en carburant, et l’usure de la mécanique, des pneus et des routes. Ils ajoutent qu’il faudrait empêcher la circulation des voitures en ville, et améliorer les transports en commun.
Ils distinguent deux catégories de travail.
Le travail lié, ou contraint, remplissant les tâches inhérentes au bon fonctionnement de la société.
Et le travail libre, épanouissant et rempli de sens pour celui qui l’effectue.
Ils proposent que tout le monde participe au travail lié, en échange de quoi l’individu recevrait de la communauté, de quoi subvenir à ses besoins.
Ainsi, arguent-ils, beaucoup de tâches superflues disparaîtraient, puisque chacun y participerait, et que certains ne se contenteraient plus de l’exiger d’autrui.
Et la population active s’élargirait, car tous travailleraient dès 16 ans. Les jeunes gagneraient en indépendance ; les femmes en émancipation (les hommes n’ayant plus de prétexte pour couper aux tâches ménagères), et les retraités abandonneraient leur retraite. Par ricochet il n’y aurait plus de chômeurs, et les inégalités de richesse seraient en partie gommées.
De calcul en calcul ils en ont déduit qu’on pourrait travailler deux heures par semaine, peut-être trois. Ainsi nous vivrions dans une société où l’on consommerait moins mais mieux, où l’on aurait du temps libre pour faire les choses et non les faire faire..., une véritable révolution !
Quarante ans plus tard, apparaît le texte : travailler une heure par jour, du collectif Bizi.
Les arguments sont inchangés, seuls les exemples sont mis au goût du jour.
Cela dit, leurs raisonnements ne sont pas pris au sérieux, et beaucoup se gaussent de tels propos. Mais les mentalités évoluent, les écologistes aussi étaient moqués dans les années 1970, alors qu’aujourd’hui, nécessité oblige, on les considère d’un œil plus respectueux. A suivre donc …
P.S. : Votre avis est toujours bienvenu, jetez-vous à l’eau et dites-nous ce que vous en pensez...
Sources :
Travailler deux heures par jour. Collectif Adret, 1977
Travailler une heure par jour, https://bizimugi.eu/groupes-thematiques/travail/travailler-1h-pdf
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