Présenter un bref historique d’Halloween paraissait des plus simples.
Halloween : fête américaine, d’origine celte, qui traversa l’atlantique à dos de publicistes zélés. Mais, à y regarder de près l’affaire s’est corsée. L’Histoire est remplie de nouvelles vérités !
Halloween, une fête celte ? La plupart des chercheurs, et par ricochet les articles s’accordent : La Samain celte est l’ancêtre d’Halloween. Pourtant d’autres universitaires contestent. C’est le cas de Renaud Zeebroek qui écrit « aucun élément sérieux ne permet d’établir une filiation entre la Samain celte et la Toussaint et Halloween ». Il souligne que la Samain ressemble plus à une fête guerrière, clôturant la saison militaire.
Et il affirme que Halloween serait carrément une fête catholique.
Halloween s’est incrustée dans les habitudes, mais son expression est des plus mutantes. Au gré des générations, de la législation, et de la tolérance qu’on lui accorda, sans cesse elle s’est transformée.
Les premières traces avérées ? Au 18e le nom d’Halloween apparaît, ainsi que les premières descriptions, même si elles sont attestées dès le 17e, et qu’on les soupçonne d’être antérieures.
Où ? Dans le Nord de l’Angleterre, en Ecosse, et dans certaines parties du pays de Galles et l’Irlande.
A chaque localité ses habitudes. Dans le Nord de l’Angleterre, il y avait la Nut-crack Night : cette nuit, on se gavait de noix, et les jeunes femmes tentaient de deviner qui serait leur futur mari. En Irlande, la fête célébrait la pomme. On y voyait, entre autres, les jeunes hommes, mains liées dans le dos, essayer d’attraper une pomme dans une bassine d’eau.
Si l’on croit un poète écossais, à Edimbourg, au 18ème, le programme de Halloween c’était : drague, gaité et bonnes bières. Ajoutons qu’en Angleterre et en Irlande aux mois de novembre et de décembre, les gens avaient l’habitude de faire des tournées déguisées. Et que durant des siècles, dans les cimetières ou les églises , la population mangeait, chantait, vociférait. Puis, l’opinion publique la critiqua, et Halloween tomba aux oubliettes.
A cette période, moult « Britanniques » émigrèrent en Amérique du Nord. Pour se rapprocher de leur origine, ils réadoptèrent Halloween. Les journaux la présentèrent comme une fête « ethnique », et plutôt séculaire, provenant du Nord de l’Angleterre et de l’Ecosse, préservée par la classe supérieure de la Nouvelle Angleterre.
Et c’est parce qu’elle ne fut pas assimilée à une fête catholique que Halloween put s’intégrer, et se propager, en cette zone protestante.
Son usage s’étend sur le territoire, et déborde de son cadre « ethnique ». Dans les années 1880 des universités états-uniennes et canadiennes l’adoptent, et ses manifestations se prolongent à l’Ouest, Texas, San Francisco.
Cette fête était appréciée. Sûrement parce que c’était l’un des rares moments où les jeunes pouvaient défier l’ordre social et investir l’espace public.
Oui, durant des millénaires le peuple a festoyé. Et durant ces moments (limités) tous les verrous sautaient. L’ordre établi était renversé par le biais de charivaris, et autres amusements cathartiques...
Après la Première Guerre mondiale les journaux signalent des excursions nocturnes de la jeunesse. Mais par son comportement elle en fera une nuit des « méfaits ». Parmi les farces : asperger les passants de farine ou de cendre, déraciner les légumes, dépendre les enseignes. A la campagne les canulars restaient acceptables, chacun se connaissant. Mais en ville, les joyeux drilles se lâchaient : vols, incendies et tutti quanti ! La complaisance vis-à-vis de leur agissement s’évapora, et de nombreux jeunes se retrouvèrent devant les tribunaux.
Aussi, pour canaliser les énergies violentes, les communautés organisèrent et dirigèrent des parades, et des soirées. Pour se déguiser les gens revêtaient les costumes des héros cinématographiques, comme Charlie Chaplin, ou les masques des personnages antisociaux de l’époque : mendiant ou vagabond pour les hommes, Bohémienne pour les filles.
A partir de 1942, le vandalisme est interdit, et le « trick or treat » (apparu en 1939 ) se généralise. La festivité commence dès lors à être réfléchie commercialement, par les fabricants de sucreries et les marchands de déguisements en premier.
Dans les années 1970 et en 1982, Halloween fait l’objet de légendes urbaines. Des enfants auraient été empoisonnés par des bonbons. Les parents recommandent à leurs rejetons de n’accepter que les gourmandises industrielles, la surveillance est de mise, les cortèges maigrissent. Une nouvelle transformation s’opère, les maisons hantées ouvrent leurs portes, on s’inspire des films d’horreur. Vampires et morts-vivants en tête de cortège, la fête n’est pas enterrée !
A partir des années 1990 Halloween réintègre l’Europe via des campagnes publicitaires de tous bords.
En France, on dit que la sauce n’a pas vraiment pris. Pourtant, chaque ville propose des activités culturelles estampillées Halloween : balades nocturnes, bals vampiriques, labyrinthes déguisés, cortèges maquillés, potions magiques...
Mais vous ? Que faites-vous pour Halloween ?
Sources :
Renaud Zeebroek, « Persistance ou transformation ? La trajectoire d'une fête », Ethnologie française 2006/2 (Vol. 36)
Renaud Zeebroek, Survivance ou intempérance ? À propos du « Lundi perdu » , Revue du Nord 2005/4 (n° 362)
Adrien Lherm, La fête d’Halloween de l’Ancien Continent au Nouveau Monde du XVIIe à nos jours, printemps 2003
Katia
l'avis de la communauté