Le travail est l’un des piliers de l’émancipation féminine. Ces paroles, prononcées par la majorité des féministes post 1968, retentissent encore à nos oreilles, telle une vérité sine qua non.
Sans toujours le savoir, les soixante-huitardes reprenaient les revendications des militantes de 1848 (date de l’une des révolutions françaises), et qui en sus réclamaient leurs droits politiques ainsi que l’instruction .
Et pourtant, les femmes ont toujours travaillé, en plus de leurs tâches domestiques, et de l’éducation des enfants. (voir l’article Histoire des femmes dans le monde du travail).
Force est donc de constater : le travail n’émancipe pas la femme. Il participe à son émancipation, éventuellement. Les féministes de 48 ne s’y étaient d’ailleurs pas trompées : « Ce que l’ouvrière veut, ce n’est plus l’aumône organisée, c’est le travail justement rétribué » lit-on dans « La Voix des Femmes ». Traduction : s’il s’agit d’un travail au salaire de misère, et aux conditions d’esclave, bonsoir !
La libération résidait, en fait, dans l’abolition des jougs qui pesaient sur les femmes, et qui les empêchaient d’être autonomes. Car effectivement des liens (moraux, législatifs et financiers) les rendaient entièrement dépendantes de leur père, de leur mari, ou de leurs frères.
Il faut dire que les femmes, en matière de droits et de considération, reviennent d’infiniment loin.
Dans l’antique passé, à Rome, le père avait le droit de vie et de mort sur ses enfants à la naissance. Toujours il conservait les mâles, et fréquemment il se débarrassait des filles.
Mais plus récemment, au 19e siècle, la femme conservait une bien piteuse réputation. Afin d’illustrer ces positions, je vous propose un succinct florilège d’ « Essai sur les femmes » du célèbre Schopenhauer :
A partir des années 1960, une rupture se produisit dans le rapport des femmes au travail. Jusque- là, ces dernières travaillaient, en principe, de manière entrecoupée par les périodes consacrées aux enfants, ou la prise en charge d’un parent malade ou grabataire.
Aujourd’hui la plupart des femmes possèdent une éducation et 80% travaillent, ou veulent travailler pleinement.
La bataille pour l’émancipation semble gagnée. Une femme peut désormais quitter son foyer parental, travailler, et subvenir, seule, à ses besoins toute sa vie. Il lui est aussi possible de partager au denier près les frais du foyer, en plus de s’offrir elle-même ses « coquetteries ». Constatons que le turbin est devenu primordial dans leur vie. Celles qui en sont privées se sentent souvent nulles, voire inutiles, (alors qu’elles s’occupent du foyer et des enfants). Tandis que d’autres, nombreuses, acceptent des conditions les plus médiocres, parce qu’il le faut. Ajoutons que si dans les années 1950 un seul salaire subvenait aux besoins d’un foyer, ce n’est plus le cas.
Ce sont elles qui majoritairement accomplissent les tâches les moins payées et qualifiées, mais les plus « flexibles ». Pour prendre une image : elles remplissent le bas du panier.
De plus, persiste un sexisme ambiant connecté directement aux siècles passés. Et, constatons : les postes à responsabilités leur sont en grande partie fermés, comme les hauts salaires. Par exemple, en 2018, le conseil exécutif du Medef compte dix femmes sur 45 membres. Quant aux sociétés du CAC 40, elles sont dirigées par des hommes, exclusivement (il y eut une femme, rapidement éjectée). Aussi, en France, nous n’avons pas encore élu de femme présidente, au contraire du Pakistan, ou de l’Allemagne dirigée par la chancelière Angela.
La femme a gagné une certaine indépendance financière ces dernières décennies en Occident, assurément. Mais en contrepartie elle a perdu la main sur l’éducation de ses enfants. De ce côté, désormais elle dépend des services qu’avaient mis en place les féministes de 1848, comme les crèches. Car il n’y a pas eu de grande avancée concernant les tâches domestiques.
La femme continue à s’en charger, en grande part, en sus de son travail à l’extérieur. Résultat : la vie de certaines mères, travailleuses, relève du marathon. Courir après le temps pour tout accomplir, telle est leur actuelle situation. Et la société saura se montrer sévère si elles manquent à leurs obligations.
Emancipée donc, la Française des années 2000, mais pas prête à se reposer !
Serait-il l’heure de redéfinir les conditions de l’émancipation féminine ?
Katia
Sources :
Riot-Sarcey Michèle. Emancipation des femmes, 1848. In: Genèses, 7, 1992. Lieux du travail. pp. 194-200;
A.Schopenhauer, Essai sur les femmes, Editions Mille et une nuits.
De Gourmay, Grief des dames, Editions Mille et une nuits
Gisèle Halimi, La cause des femmes, Grasset, 1973.
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